Il y a de
cela maintenant 4 ans, jour pour jour, Pierre Doiron est décédé. Pierre était le conjoint de
longue date de ma sœur. Le 11 décembre 2010, ils célébraient leur 9e
anniversaire. Les événements précédent son décès étaient loin d’être heureux
et, encore à ce jour, j’ai de la difficulté à croire que Jolène s’en soit si
bien sortie.
J’étais venue visiter mes parents la fin de semaine
précédente avant de me lancer tête première dans mes examens universitaires.
Durant cette fin de semaine, Jolène m’a demandé d’aller la visiter à sa maison.
Elle m’a demandé de l’aider à déménager ses choses, ça n’allait plus entre
Pierre et elle, elle revenait à la maison familiale. C’était étrange de la voir
si dull, elle qui déplaçait toujours tellement d’air. Je suis donc
retournée à Moncton sachant très bien que ma sœur était instable.
Quelques jours plus tard, je suis allée au cinéma voir deux
films (crazy, I know!) Entre les deux films, Jolène m’a texté me
demandant de l’appeler aussitôt que possible. Comme j’étais déjà entré dans la
salle pour le deuxième film, je lui ai expliqué que je ne pouvais pas pour l’instant
mais que je la rejoindrais dès que je sortirais si c’est-ce qu’elle voulait.
Elle m’a écrit qu’elle venait de découvrir que Pierre l’a trompait depuis un
bon bout de temps et qu’elle voulait donc pouvoir me parler peu importe l’heure.
Une fois le film terminé, j’ai ouvert mon cellulaire : six appels manqués,
tous de la maison. Je PANIQUE! Elle n’aurait pas… Elle n’aurait jamais pu… J'ai donc rappelé mes parents sans attendre, depuis le lobby du cinéma. Ma mère m'a répondu. Je lui ai expliqué pourquoi je n’avais pas répondu. Elle m'a demandé si je
savais pour Pierre. Je lui ai répondu que Jolène m’avait expliqué brièvement qu’il la
trompait, oui. Sa réponse est encore gravée dans ma mémoire : « Non,
c’est pas ça. Pierre est… Pierre est mort!... » Je suis demeurée muette. Mes jambes
n’arrivaient plus à me soutenir. Je me suis laissé tombé par terre en
pleure. Les gens qui passaient me regardaient avec curiosité et des visages qui
disaient clairement « WTF?!? Tu sais pas comment te comporter en public toé? ».
Ma mère m'a dit plein de choses pendant ce temps. Tout ce que j'ai retenu c’est :
Accidents, transports et Miramichi. Ma prochaine question était simple : « Jolène? »
Elle était partie identifier le corps à la morgue. Il me restait encore deux examens
mais avant de raccrocher, j’ai dis à ma mère : « J’arrive demain. »
Le lendemain, je me suis arrangée avec mes deux enseignants. Les
deux m’accordèrent un I pour incomplet et me demandèrent de les contacter à mon
retour en janvier. Je suis partie seule. Stupide, je sais! Je n’arrivais plus à penser.
À Miramichi, j'ai bloqué. La machinerie lourde était encore en train de nettoyer
les débris causés par l’accident. Je me suis arrêtée, quelques mètres plus loin, mes
larmes m’aveuglaient. Je suis arrivée et tout le monde était inquiet car personne n’avait eu
de nouvelles de Jolène depuis le matin. J’ai réussi à la rejoindre par text et
elle m'a décrit les derniers jours comme suit : Depuis la veille, elle avait appris que son chum la trompait depuis des mois, qu’il avait eu un accident, qu’il était décédé. Maintenant, voilà qu’elle apprend que la maîtresse est enceinte!
Quand je vous dis qu’elle n’allait pas bien, je crois que c’est un understatement.
Durant les trois semaines
suivantes, j’ai suivi Jolène dans tous les préparatifs. Cercueil, messe,
fermeture des comptes, etc. Je n’arrive pas à croire qu’un meilleur système,
plus efficace et moins demandant, n’existe pas pour venir en aide aux gens en
deuil. Tout est tellement compliqué! La paperasse à remplir est insurmontable
et les coûts associés à certaines procédures sont horriblement élevés. Jolène a maintenu la tête haute mais je savais qu’elle était sur le point d’exploser. Je ne voulais
pas retourner à l’université. Je me sentais comme si j’abandonnais ma sœur au
moment où elle avait le plus besoin de moi. Mes notes en ont pris un coup. J’étais
frustrée, mal patiente, désagréable, constamment dans la lune. J’étais
physiquement à Moncton, mais ma tête et mon cœur étaient à Bertrand.
En mais, ma sœur a rencontré Christian lors d’une soirée. En
juin, ils ont commencé à se côtoyer plus sérieusement. En septembre, elle est
tombée enceinte. À Noël, elle a perdu l’enfant. Le 1er janvier, ils
se sont fiancés. En avril, elle est tombée enceinte à nouveau. En août, ils se
sont mariés et, du même coup, ont annoncé à tous la nouvelle de l’enfant à venir
(ma mère m’a frappé parce que j’avais osé garder le secret :-p ) En
janvier, Luka est né. Presque deux ans plus tard, Marylou est venue au monde. Si
quelqu’un m’avait dit que tout ceci allait avoir lieu moins de quatre ans après
le décès de Pierre, je leur aurais rit dans la face.
Je n’ai pas écris ce texte pour salir la mémoire de
Pierre. Il était conscient de ce qu'il faisait mais il ne mérite pas pour autant qu'on se souvienne de lui pour les mauvaises raisons. C'était un bon gars qui a pris de mauvaises décisions, voilà tout. Je l’ai écrit pour deux raisons. Je
voulais revenir, une bonne fois pour toute, sur le moment qui a causé le plus
grand traumatisme dans ma vie et qui m’a changé boute pour boute du jour au
lendemain. Je l’ai aussi et surtout écrit pour célébrer ma sœur. Je suis fière
de Jolène. Elle a été la plus forte de nous deux durant ces épreuves. Pourtant c’était
elle qui aurait dû être la plus affectée par tout ceci. Elle a adopté une
attitude de que sera, sera. De mon côté, la perte de contrôle dans des
situations de ce genre me rend folle. J’aimerais être plus comme elle et garder
la tête haute et le sourire même quand tout autour de moi s’effondre. Un jour,
peut-être, j’en arriverai là.
Shotgun Godin
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